Les assassins de la démocratie.

 

Ces dernières semaines ont donné à tous les citoyens plusieurs occasions d'observer la conception qu'ont à présent de la démocratie les partis qui s'en réclament le plus lourdement.

N'ayant à la bouche que le mot "démocratie", qu'ils crient à tout propos et hors de propos comme un refrain ânonné dans l'espoir d'encore séduire l'électeur, les politiciens au pouvoir en ont confisqué l'étiquette à leur usage exclusif et en ont falsifié le contenu. Tandis que pour 99 % des citoyens, la démocratie signifie simplement gouvernement selon la volonté de la majorité populaire, les politiciens au pouvoir savent que selon cette conception ils sont perdants, prisonniers d'une orientation politique qui va tout à fait à l'encontre de cette volonté populaire. Alors ils trichent: ils ont modifié la signification de "démocratie" pour pouvoir continuer à s'en prévaloir, et pour pouvoir taxer d'"anti-démocrates" ceux et celles qui ne partagent pas leur vision politique. Ainsi, pratiquant désormais la loi du plus fort, ne tenant surtout pas à ce que la vraie démocratie les prive du pouvoir, ils tombent le masque, et se condamnent à la fuite en avant vers une dictature idéologique de plus en plus évidente.

 

Car voici que pour eux, la "démocratie" n'est plus ce que les citoyens entendent par là, à savoir la traduction par un gouvernement élu des desiderata de ses électeurs, mais bien au contraire, c'est une idéologie particulière qu'ils entendent imposer aux citoyens. Tandis que la démocratie est pour tout le monde un système de gouvernement qui reflète les vœux des électeurs émis selon le suffrage universel, pour eux il s'agit au contraire d'un système de valeurs qui PREVAUT sur la volonté des citoyens-électeurs…

 

Ce système de valeurs, cette idéologie particulière à laquelle (à l'instar de l'ancienne "République démocratique allemande") ils ont conféré -dans une escroquerie morale rarement rencontrée dans l'histoire- l'appellation de "démocratie", est celle du nivellement, de l'uniformisation, de la standardisation universelle, qu'il faut imposer comme tout idéal totalitaire au mépris de la volonté populaire. Cette idéologie se pose dans une vision linéaire, messianique, de l'histoire humaine, comme l'aboutissement du "sens de l'histoire". L'égalitarisme compris comme synonyme de justice et d'équité, tel est le fond de cette idéologie qui cherche à s'imposer par tous les moyens depuis environ deux siècles, et dont l'avatar communiste n'aura été qu'une tentative ayant échoué (excusez les quelques dizaines de millions de morts, mais cette juste cause n'a pas de prix assez élevé; on ne fait pas d'omelette sans casser des œufs). Le moteur de cette idéologie est une fraction doctrinaire de la gauche, moins soucieuse de justice socio-économique concrète que de nivellement culturel et moral. Une fraction de la droite prête à tout jeter par-dessus bord pour préserver ses seuls privilèges matériels s'est ralliée à cette idéologie qu'elle croit inévitable. Cette vision idéale de la société humaine est celle d'une juxtaposition d'atomes identiques, qu'on appelle humains, voués à la perpétuelle reproduction de clones, eux-mêmes finalisés vers leur seul bien-être matériel. Les différences de toute sorte, pour évidentes que les révèle la réalité (mais la réalité importe peu, c'est l'idéal qui doit la remplacer) entre individus, entre sexes, entre races, entre cultures, doivent être gommées au profit d'un stéréotype universel, quasi platonicien, dont la survenue est considérée comme une mission sacrée par les zélateurs de cette idéologie, maintenant requalifiée de "démocratie".

 

Mais comme nous sommes réalistes, nous entendons la démocratie comme tout le monde, c'est à dire comme la liberté pour chacun de penser ce qu'il veut, d'exprimer son point de vue, la liberté de réunion, d'association, et comme le système de gouvernement où toute idée peut se proposer aux suffrages des citoyens, lesquels sont libres de choisir entre des conceptions politiques variées.

 

Force nous est de constater que la pensée unique du politiquement correct tend à la dictature, une dictature rampante qui prétend interdire aux citoyens de choisir entre des conceptions différentes, car on s'arrange pour ne plus leur présenter de choix qu'entre des variantes du même et unique système de pensée (qu'il s'appelle PS, PRL, PSC ou Ecolo), tout autre étant a priori taxé d'anti-démocratique.

 

Un comble quand on sait que tous ces partis se défient comme de la peste de l'idée-même de referendum, qu'ils prônent le vote obligatoire, qu'ils pratiquent le système de la case de tête empêchant l'électeur de choisir librement son élu, qu'en Belgique aucun referendum n'a été organisé ces dernières années pour permettre aux citoyens de se prononcer sur les grands choix que les partis ont imposés au pays, que les présidents de ces partis sont, de l'aveu de tous les spécialistes, les vrais décideurs politiques alors qu'ils ne sont pas élus par les citoyens, que le Premier Ministre lui-même n'est pas élu au suffrage universel, que tous les grands médias sont subventionnés par le pouvoir politique et ne sont de ce fait plus libres...

 

En fait en Belgique nous ne vivons déjà plus qu'en "particratie". Et ce sont les mêmes personnages qui osent taxer d'anti-démocratiques les partis qui ne demandent qu'une chose: conformer les orientations du pouvoir politique aux désirs profonds des citoyens-électeurs, notamment en instaurant le droit de referendum !

 

Chacun a pu constater ces dernières semaines qu'en dépit du prescrit constitutionnel (art.19: "Les Belges ont le droit de s'assembler paisiblement et sans armes, en se conformant aux lois qui peuvent régler l'exercice de ce droit, sans néanmoins le soumettre à une autorisation préalable."), il semblait normal à de nombreux "démocrates" que soit interdit le Congrès du Vlaams Blok. N'étant pas suspects de partager les visées séparatistes de ce parti, nous pouvons sans complexe estimer que tout parti ayant des élus, doit être traité de la même façon que n'importe quel autre, et sans qu'intervienne en quoi que ce soit le fond de son programme, du moment qu'il s'agit d'un parti qui respecte la légalité. On a, au contraire, entendu évoquer le prétendu "racisme" du VB pour chercher prétexte à interdire son Congrès, comme par ailleurs on cherche à l'interdire de subsidiation pour la même raison. Il faut, sans considérer le programme de ce parti que par ailleurs nous combattons, bien voir une dérive totalitaire des partis au pouvoir, s'ils se mêlent de limiter les libertés constitutionnelles au gré de leurs jugements de fond: l'idée-même d'opposition politique serait battue en brèche ! Il est sain et naturel qu'en démocratie, des partis s'opposent à la ligne politique de la majorité au pouvoir: quand par exemple le pouvoir est communiste, il est logique, naturel et salutaire qu'il se crée des partis anti-communistes. Ici, quand on constate que la majorité au pouvoir, de son propre aveu, favorise les étrangers, immigrés et réfugiés, il est logique, naturel et salutaire que se constituent des partis nationalistes et identitaires… Prétendre les interdire au nom-même de leurs idées, qui n'auraient pas droit de cité, équivaut quasiment à l'aveu d'une dictature des idées au pouvoir ! Et ce sont ces mêmes gens qui se gargarisent de tolérance, d'ouverture, …de démocratie !

Il faut les appeler plutôt les ASSASSINS DE LA DEMOCRATIE.

Car quand une opposition légale est déclarée illégale, quand les choix de dizaines de milliers d'électeurs sont tenus pour nuls, quand un pouvoir ne respecte plus la constitution, on quitte l'Etat de droit et on s'engage dans une voie qui ne peut mener, à terme, qu'à la guerre civile.

 

I. L.

(Bastion n°29 de décembre 1998)

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