Les extrémistes, ce n'est pas nous !

 

Michel Eyquem de MontaigneA force d'entendre un mot utilisé dans un certain sens comme signifiant quelque chose de précis, chacun finit par reprendre en chœur la même chanson, sans plus songer à réexaminer la signification exacte de ce mot… La psychologie générale est ainsi faite; malheureusement, car on serait souvent bien étonné de ce qu'on découvrirait ! Montaigne avait bien dit que la plupart des malentendus du monde sont grammairiens…

Il en va ainsi des mots "extrémisme" et "extrémiste". Ici le malentendu n'est pas perdu pour tout le monde… La connotation de ces mots étant clairement négative, il importe de les appliquer à ceux que l'on combat, c'est à dire à nous. Du moins tant que cela marchera.

 

Le Grand Robert nous apprend que le mot "extrémiste" est apparu en 1922 dans le Larousse universel, et en donne pour définition: "partisan d'une doctrine poussée jusqu'à ses limites, ses conséquences extrêmes; personne favorable aux idées, aux opinions extrêmes."Larousse

On voit tout de suite la mauvaise foi, ou l'ignorance de ceux qui utilisent ce mot à notre sujet!

Car en quoi sommes-nous extrémistes, selon cette définition?

 

En revanche, je me ferai ici un plaisir de montrer en quoi il s'applique bien plus justement à ceux qui, si on excepte les braves gens qui par conformisme et préjugé répètent ce qu'ils entendent, s'ingénient à nous calomnier et à nous dénigrer par tous les moyens, surtout les plus malhonnêtes…

 

"Partisan d'une doctrine poussée jusqu'à ses limites, ses conséquences extrêmes" avons-nous lu comme définition de l'extrémiste. Ceci veut bien dire que toute doctrine a ses extrémistes, et aussi que toute doctrine peut être entendue de façon souple et nuancée. Ce qui revient à devoir reconnaître qu' aucune doctrine n'est extrémiste en tant que telle. Le nationalisme, aussi bien que le socialisme ou le libéralisme peut être entendu selon ses grands principes de base, sans pour autant qu'il mérite d'être assimilé à un extrémisme. Toute autre vision relèverait de la pure polémique.

 

Naturellement, toute doctrine, qu'elle soit politique, religieuse ou philosophique, a généré et générera toujours ses extrémistes, ses maximalistes, qui voudront pousser la doctrine jusqu'à ses limites, ses conséquences extrêmes. Ainsi le nazisme, qu'il faut voir comme un extrémisme du nationalisme, et comme un extrémisme du racisme. Car au fait, le racisme comme tel n'est pas non plus un extrémisme, puisque par exemple l'Union sud-africaine d'avant Mandela était fondée sur une vision raciste de la société sans qu'on puisse raisonnablement la qualifier d'extrémiste. De même, les 33% d'Européens qui se déclarent ouvertement racistes (selon l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes), personne de raisonnable ne peut les assimiler à des extrémistes, des nazis.

C'est ce que font pourtant, dans un amalgame fallacieux, les anti-racistes, lesquels ne comprendraient par exemple jamais qu'on puisse ne pas être raciste sans être pour autant anti-raciste…

 

Mais revenons aux extrémistes, comme partisans des doctrines poussées dans leurs conséquences extrêmes. On a connu pendant longtemps des extrémistes du prosélytisme catholique, n'hésitant pas "pour la bonne cause" à brûler vifs les "hérétiques", et lors de la conquête du nouveau monde à mutiler par milliers les indigènes revêches à l'évangélisation. Qui songerait, en dépit de ces excès passés, à qualifier le catholicisme d'extrémiste en tant que tel ?

Plus récemment, combien de millions de morts peut-on mettre à l'actif du communisme ? 85 millions AU MOINS, sur la seule base des documents officiels (rapporté par Charles MAGNE dans le Bastion de janvier, où mon confrère citait les chiffres du Livre Noir du Communisme). Avec un tel palmarès, le communisme dépasse le nazisme haut la main, ne dirait-on pas ? Et sur le plan doctrinal, alors que la nazisme est bien un extrémisme du nationalisme et du racisme, le communisme est-il autre chose qu'un extrémisme du socialisme ? Or, qui donc traite les socialistes d'extrémistes pour cette raison ?

Plus étonnant: les communistes eux-mêmes ne sont habituellement pas qualifiés d'extrémistes!!!

Et dans le même temps, les simples nationalistes le sont, sous prétexte des excès du nazisme…

 

Ceci remet les pendules à l'heure, il me semble. Mon intention est simplement de déculpabiliser nos membres et sympathisants qui ne seraient pas encore affranchis des mystifications auxquelles les médias soumettent en permanence les gogos. Car j'en connais qui, admirables, assument , résignés, l'étiquette "extrémiste", alors qu'ils ne le sont en rien !

 

 

Par contre, comment doit-on appeler, en bon français, les tenants d'une éthique universaliste poussée dans ses conséquences extrêmes, telle que celle qu'on voit actuellement fleurir ?

 

Des gouvernements qui, au lieu d'exercer leur fonction au bénéfice de leurs électeurs, comme se conçoit le rôle logique de tout gouvernement, écrasent au contraire ceux-ci sous des impôts et charges qu'ils distribuent à des étrangers, de tels gouvernements ne font-ils pas la preuve évidente qu'ils ont opté pour une conception proprement extrémiste de l'humanisme ?

 

Quand des gens défient les lois édictées dans l'intérêt général de la collectivité, en cisaillant des grillages pour permettre à des étrangers arrivés clandestinement dans le pays de s'y répandre sans contrôle et au risque de contaminer leurs propres concitoyens, ces gens-là sont incontestablement inspirés par une vision extrémiste de l'éthique universaliste.

 

Quand des criminels multirécidivistes avérés sont arrêtés, jugés et condamnés tout juste à quelques années de prison, qu'ils purgent dans des conditions plus confortables que bien des honnêtes citoyens sans domicile fixe, ne voit-on pas qu'on verse dans une conception extrémiste des droits de l'homme ?

 

Quand on voit un Etat dépenser plus d'argent dans l'enseignement pour les cancres que pour les bons élèves, n'est-ce pas le fait d'une vision extrémiste de l'idéologie égalitaire ?

 

Quand on voit un Etat édicter des lois qui briment les citoyens au nom d'une idéologie, on n'est plus en démocratie, mais dans une espèce de théocratie, et cela c'est le véritable extrémisme. Car en vérité, la fonction première des lois est de traduire l'intérêt général d'une société et de ses membres, et non de traduire une éthique, auquel cas on se trouverait exactement dans une société totalitaire…

 

Face à une hystérie comme celle que nous connaissons, et dont je viens juste d'évoquer les premiers symptômes qui me sont venus à l'esprit, nous sommes, nous autres, le contrepoids d'un bon sens multi-séculaire à une vision extrémiste, maximaliste d'une éthique qui n'est pas nouvelle, mais qui avait toujours été l'expression d'un idéal, qu'à toutes les époques on avait comprise comme tel: un idéal.

Si maintenant certains veulent apparemment pousser cet idéal dans ses conséquences extrêmes, voulant remodeler les réalités à l'étalon de cet idéal, ils aboutiront à démontrer par l'absurde l'inanité foncière de cet idéal lui-même. A cet égard, ce sont eux, les seuls extrémistes, en cette fin de siècle, eux qui sont en train inconsciemment de tuer leur propre éthique.

Et quand on voit cet extrémisme universaliste fleurir et tout envahir, il faut le voir comme le dernier printemps et le champ du cygne de l'éthique universaliste.

 

I. L.

(Bastion n°31 de février 1999)

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