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IN MEMORIAM : Jean Militis

 

Il est des hommes que l’on croit immortels, parce que de leur vivant, ils sont déjà une légende vivante. On est tout surpris d’apprendre qu’ils sont décédés. Jean Militis faisait partie de cette race qui ne laisse personne indifférent.

J’avais fait sa connaissance alors que j’étais élève à l’Ecole Royale Militaire: je devais faire un travail sur la résistance durant la guerre. Le professeur Jean-Léon Charles, qui visiblement ne l’aimait pas, m’avait dit de ne pas croire tout ce qu’il me raconterait. Après des recherches approfondies, je peux dire qu’en réalité Jean Militis était un homme plutôt modeste: tellement ce qu’il a réalisé durant la guerre est incroyable…

Bûcheron à 16 ans, il entra très tôt dans la résistance et devint le commandant en second du secteur 7 de la zone V de l’armée secrète: il avait des lieutenant-colonels d’active sous ses ordres! Un jour, à lui seul, il étrangla deux sentinelles allemandes en une fois: plusieurs témoins médusés assistaient à la scène !

Dès la libération, il continua la lutte dans un escadron de reconnaissance de l’armée américaine. Il fut blessé à plusieurs reprises.

En 1946, il s’engagea aux commandos et devint officier. Volontaire pour la Corée, il commanda, comme lieutenant, la Compagnie B du Bataillon belge. Au Congo, il mit au point des techniques de survie.

De 1958 à 1964, il commanda, comme major, le centre d’entraînement de commandos. Il passa ensuite au cabinet du ministre de la défense Charles Poswick.

Dès 1962, il s’est occupé des handicapés et organisera régulièrement des camps de vacances pour ceux-ci. Car ce dur d’entre les durs avait un grand cœur!

Il terminera sa carrière comme colonel au cabinet du ministre de l’intérieur Joseph Michel. C’est là que je fis pour la première fois sa connaissance.

J’eu par la suite de fréquentes rencontres avec lui. Il fut le premier à me féliciter lorsque j’obtins mon brevet de commando.

Homme de franchise, nous nous sommes quelquefois franchement querellés. Notamment lorsqu’il m’impliqua dans un règlement de comptes avec le Professeur Jean-Léon Charles, par l’entremise du Pourquoi Pas?

Je me souviens aussi d’homériques «quatre-vingt chasseurs» en sa compagnie...

Je n’ai pas peur de dire qu’il fut mon ami. Il était député lorsque je devins attaché de cabinet. J’y ai assisté à son désenchantement politique, qui précéda de peu celui du sénateur général Robert Close…

Retiré à Sainte-Marie-sur-Semois, nous restions en contact. Plus récemment, nous utilisions Internet: signe de jeunesse pour un homme de plus de 80 ans... Il me confiait ses soucis au sujet de la santé de l’épouse du procureur du Roi d’Arlon, des problèmes avec sa dernière épouse et de son dernier fils, qu’il voulait voir casé…

Jean Militis était un fidèle lecteur du Bastion. Il approuvait ma démarche, mais sans illusions.

Je devais aller le voir cet été: je n’ai pas trouvé le temps à cause des élections. Alors que je lui présentais mes excuses au téléphone, pour la première fois, ce battant m’a donné une impression de lassitude. Je regrette de ne pas avoir trouvé le temps de le revoir une dernière fois.

Militis: son nom le prédestinait à devenir un soldat. Il fut un grand soldat, un vrai soldat du temps de guerre. Pas un de ces scribouillards intrigants de l’Etat-Major pour lesquels il éprouvait tant de mépris.

Il fut un soldat comme nous en manquerons bientôt, lorsque viendra l’heure de vérité...

Jean Militis a écrit cinq livres vendus au profit des handicapés dont il s’occupait:

-La peur apprivoisée (1986)

-La forme après 50 ans (1989)

-La piste du risque: commando parachutiste (1991)

-Parachutages et Services secrets (2001)

-Etre et durer (avec René-Philippe Dawant) (2004).

Mes plus sincères condoléances à ses 4 enfants et à tous ceux qui, commandos ou non, ont trouvé en lui un modèle.

F.X. Robert

 

 

 

(Bastion n°103 d'Octobre 2006)

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