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Les armes des particuliers : 
confisquées et détruites ?

 

Le Bastion n°53 expliquait le désastreux projet du gouvernement belge prévoyant d'interdire la détention de toute arme, sauf exception.
Le texte ci-dessous aborde le problème du point de vue du collectionneur...

Le monde des armes est en émoi. Le ministre Verwilghen entend, tout prochainement, interdire toute détention d'armes, par des particuliers. Sauf autorisation expresse, délivrée par le gouverneur, et à des conditions drastiques. Collectionneur, tireur sportif, chasseur, simple détenteur, héritier d'armes de famille... tous les Belges sont concernés. Aujourd'hui, c'est un collectionneur qui nous parle. Du magnifique patrimoine wallon, aujourd'hui en péril: armurerie et fabrication d'armes légères. De l'attitude du monde politique flamand. Des stands de tir. Du tir pratique. Il nous entretient, à bâtons rompus.

 

Le Bastion: Le projet du ministre Marc Verwilghen, est clair: "La détention d'une arme à feu soumise à autorisation ou des munitions y afférentes est interdite aux particuliers, sauf autorisation délivrée par le gouverneur compétent". Vous vous opposez fermement à ce projet. Concerne-t-il beaucoup de Belges?

 

Un collectionneur: Et comment! Il y a, en Belgique francophone, quelque 500.000 personnes intéressées, de près ou de loin, par les armes. Plus leurs familles. D'après le Registre Central des Armes, créé par la loi du 30.1.1991, il y a 440.000 armes enregistrées en Belgique. Ce sont les armes de guerre et les armes de poing, pistolets et revolvers, et les armes assimilées, 22LR et riot-guns. Les armes de chasse et de sport, acquises après 1991, sont enregistrées sur base d'un modèle 9. Mais ce n'est là qu'une fraction, des armes légales. Le reste, en détention libre et non enregistrée, sont les armes de panoplie, dont les armes anciennes et les armes démilitarisées. Ne sont pas comprises non plus, les armes de chasse et de sport, acquises avant 1991.

 

Le Bastion: Les tireurs sportifs pratiquent, dans les stands de tir. Pourquoi l'arrêté royal du 13.7.2000, sur les stands de tir, est-il si controversé?

 

Collectionneur: Cet arrêté royal a paru au Moniteur, trois mois après l'émission "Mise au Point" du 16.4.2000, à la RTBF. Au cours de l'émission, le Gouverneur de Bruxelles, Véronique Paulus de Châtelet (P.S.), s'en est prise vivement aux stands de tir, surtout à ceux qui font du tir pratique. Cet arrêté royal réglemente de façon éhontée les stands de tir. Il réduit pratiquement à zéro toute possibilité d'installer des stands. L'exploitant doit même expliquer l'origine des fonds qu'il investit! Cela rompt l'égalité des Belges devant la loi. L'article 3 de l'arrêté interdit l'utilisation d'armes automatiques. Ainsi que l'utilisation d'armes semi-automatiques, sauf lorsque l'usage de celles-ci est nécessaire dans une discipline reconnue par les autorités communautaires compétentes. Donc, celui qui détient tout à fait légalement un fusil de guerre FAL, ne peut jamais s'en servir. Or, le tir à l'arme de guerre est une discipline, comme les autres. Il y a des milliers d'autorisations, dans ce pays, pour la détention d'armes automatiques, et, du jour au lendemain, on ne peut plus s'en servir dans un stand de tir! Et toutes ces armes, détenues légalement par des citoyens, sont toutes des armes qui sont passées au Banc d'Epreuves de Liège. Ce sont donc des armes qui ont été testées techniquement, de façon à pouvoir être utilisées. Quoi de plus absurde que de faire tester une arme, et puis d'en interdire l'utilisation, par arrêté royal! On ne passe pas au contrôle technique, une voiture avec laquelle on ne va pas rouler!

 

Le Bastion: Pourquoi le Gouverneur Paulus de Châtelet, est-elle si hostile au tir pratique?

 

Collectionneur: Vous avez appris à tirer selon la méthode Cooper, madame, c'est un peu cela: deux balles au coeur, une dans la tête. En fait, c'est le tir de parcours, le tir sur silhouettes humaines, sur silhouettes mobiles. L'adjudant Fiévet, de l'ex-gendarmerie, l'âme damnée de Paulus de Châtelet, disait qu'on "apprenait ainsi à tuer". Et l'escrime, alors? On transperce, théoriquement, son adversaire. C'est exactement pareil. L'escrime vient du duel. Et c'est, aujourd'hui, une discipline olympique. D'ailleurs, l'ex-gendarmerie, elle, fait bien évidemment du tir pratique. Cela signifie-t-il que la gendarmerie apprend à tuer? Allons donc. Il y a d'autres sports olympiques de ce type, voyez le biathlon. Le biathlon est d'origine militaire. Il vient des pays nordiques, Suède ou Finlande, ou montagneux, comme la Suisse. C'est l'entraînement des troupes de montagne. C'est du ski alpin et du tir au fusil à lunettes. Il y a aussi le tir duel. Vous tirez avec un pistolet 22shortR, chargeur à 5 coups, une arme très bien équilibrée, chère d'ailleurs, environ 100.000 francs. Il faut tirer dans un temps très court, 5 ou 10 secondes, 5 balles sur une cible qui tourne, une silhouette humaine. C'est le "rapid fire pistol", et c'est aussi une discipline olympique, depuis toujours. Le tir pratique, quant à lui, n'est pas encore reconnu par la Fédération Olympique Internationale. Et puis, rappelez-vous le tir aux pigeons! Ma grand-mère a encore connu le temps, en Normandie, où l'on tirait sur des pigeons vivants. Aujourd'hui, on tire aux clays.

 

Le Bastion: Vous défendez fermement les tireurs sportifs, et pourtant, vous-mêmes aimez les armes anciennes...

 

Collectionneur: C'est vrai, moi, je tire à l'arme ancienne! C'est une discipline, aussi. Voyez ce revolver Cap & Ball, de la Guerre de Sécession: il faut, pour le charger, mettre de la poudre dans les 6 chambres, mettre une balle dans chaque chambre, mettre de la graisse par-dessus, hé oui, on est en 1860, et mettre 6 amorces! Poudre, balle et amorçage sont séparés. Je suis, surtout, un collectionneur. Quand on parle d'armes, il faut savoir de quoi on parle. Il y a la grande industrie, ce qu'on appelait dans le temps les "marchands de canon". Vous avez la FN en Belgique, qui fabrique des armes légères. C'est le grand commerce international. Et puis, vous avez l'aspect privé. Ce sont tous les citoyens ordinaires, comme moi, les collectionneurs, les détenteurs d'armes, par héritage, ou autrement, les amateurs de belles armes. Moi, ma spécialité couvre la période, de 1850 à 1945. C'est l'évolution de l'artisanat à l'industrie. C'est la période de tous les brevets et de tous les systèmes. Pour nous, les collectionneurs, les armes, ce n'est pas une question de commerce et de milliards de dollars. Ce qui nous intéresse, c'est l'histoire de l'armement, et donc, l'histoire et le patrimoine de la Wallonie, à travers les armes. Car la Wallonie, et Liège en particulier, c'est une tradition armurière, séculaire. Voyez ce livre de Claude Gaier: "Quatre siècles d'armurerie liégeoise". Les armes wallonnes sont connues dans le monde entier. C'est donc un patrimoine historique indubitable. Je veux donc défendre les collections d'armes. Je veux défendre tous ceux qui, en Wallonie, ont le goût des belles armes.

 

Le Bastion: Vous ne parlez que de la Wallonie. Il y aurait donc deux sensibilités, en matière d'armes, une dans le Nord, et une dans le Sud du pays?

 

Collectionneur: Et comment! Tous nos ennuis, en matière d'armes, viennent toujours du monde politique flamand. Rappelez-vous l'attitude de la Volksunie, il y a quelques années, en matière d'exportation d'armes. Il a fallu régionaliser, les licences d'exportation. A mon avis, il faut étendre cette régionalisation, à toute la problématique des armes. Que les Flamands fassent donc ce qu'ils veulent chez eux, et qu'ils nous laissent tranquilles. Parlez-en dans les stands de tir, la régionalisation, tout le monde sera "pour". Oui, oui, madame, je vois ce que vous pensez. Les gens vivent encore dans une tradition unitaire, mais tout cela, c'est fini. Régionaliser la matière des armes, c'est extirper la racine du mal.

Comprenez-moi bien. Il y a, entre la Flandre et la Wallonie, une dualité profonde. La Wallonie est grande productrice d'armes légères. La Flandre, quant à elle, a énormément souffert pendant la 1ère Guerre Mondiale. Il s'est formé un mouvement autonomiste flamand, imbriqué dans une tradition pacifiste. Voyez le pélérinage de l'Yser, dimanche dernier. Aujourd'hui, le monde politique flamand utilise cette tradition pacifiste, pour imposer à la Wallonie, des lois qui portent gravement préjudice à son économie. Disons les choses clairement. Si la FN avait été établie à Anvers, il n'y aurait pas de mouvement anti-armes, dans le monde politique flamand. Cela creuse d'ailleurs, toujours plus, l'écart entre le monde politique et la population flamande. Car j'en connais des collectionneurs, des tireurs sportifs, des chasseurs, flamands! Ils possèdent souvent, de belles chasses, en Wallonie.

 

Le Bastion: Vous vous définissez, comme un amateur d'armes anciennes. C'est quoi, exactement, une arme "ancienne"?

 

Collectionneur: En Belgique, une arme ancienne, ou arme de panoplie, c'est une arme dont le brevet est antérieur à 1890, et la fabrication, antérieure à 1945; elle doit être chambrée, initialement, pour un calibre prévu pour l'usage de la poudre noire. Vous avez entendu parler du protocole de Vienne. Il semble que l'on adopterait, finalement, dans le cadre de ce protocole, la date charnière entre arme ancienne et arme moderne, en vigueur aux Etats-Unis: 1898. La Belgique devrait faire pareil, et déplacer la date frontière de 1890 à 1898. Entre 1890 et 1898, il y a 8 ans, mais c'est une période de très grands progrès techniques, et cela enrichirait considérablement le champ des collectionneurs.

 

Le Bastion: Quid des répliques, d'armes anciennes?

 

Collectionneur: Je suis un amateur de "gueules noires", d'armes anciennes. Mais il faut être réaliste! Les armes anciennes sont rares, et donc chères. Le Cap & Ball, dont je vous parlais tout à l'heure, date de la Guerre de Sécession et coûte 200.000 francs! On fabrique, en Italie du Nord, de fort belles répliques, pour... 15.000 francs. En 1991, ces répliques ont été classées dans les armes de panoplie, en vente libre, par arrêté royal. Filip Ide, fonctionnaire au Ministère de la Justice, n'a rien trouvé de mieux que de les classer en... armes de défense, en 1995! Pour pratiquer le tir à l'arme ancienne, il faut donc désormais pouvoir se permettre d'acheter... une arme ancienne originale! C'est une discrimination, entre tireurs fortunés, et les autres. Il faut reclasser les répliques en armes de panoplie: qui songerait à faire un hold-up, avec une arme à charger par la gueule, à la poudre noire?!

 

Le Bastion: Vous dites: la loi du 30.1.1991 est une bonne loi: il faut la maintenir, quitte à y apporter quelques modifications. Mais lesquelles?

 

Collectionneur: Le ministre flamand Verwilghen veut interdire toute détention d'armes par des particuliers, sauf autorisation du Gouverneur. C'est absurde. Dans les années 20, l'alcool était un problème, notamment dans la classe ouvrière. Chez nous, il y a eu la loi Vandervelde, une excellente loi. Elle n'a pas interdit l'alcool, elle a simplement empêché que l'alcool ne devienne un fléau social. Aux Etats-Unis, par contre, cela a été la prohibition, et, en parallèle, le gangstérisme et le marché noir. Non, non, maintenons la loi de 1991. Des modifications? Nos adversaires se font du souci, à propos de la sécurité. Mais les armes détenues par les particuliers, ne posent pas le moindre problème! La cigarette ferait 21.000 morts par an, la circulation automobile 2000 morts, et les armes légales des particuliers?! (voir chiffres sur le tract!!!) Il n'existe pas de chiffres à ce sujet, c'est dire! Les assurances ne reprennent même pas la mort par arme à feu, dans leurs statistiques sur les causes de décès!

 

Le Bastion: Le ministre Marc Verwilghen, n'a-t-il pas dit aussi, vouloir assurer la traçabilité des armes?

 

Collectionneur: Oui, en effet. Mais c'est un fait acquis: la plupart des armes sont enregistrées au Registre Central des Armes. Sauf les armes de panoplie, dont les armes anciennes, qui sont surtout des objets historiques, on l'a vu. Par contre, il est vrai que les armes de chasse et de sport, à percussion centrale, acquises avant 1991, n'ont jamais dû être déclarées: va pour la déclaration, mais elles doivent rester en vente et en détention libre. Une carabine Winchester 30.30, ayant appartenu à votre grand-père, par exemple. Accepter cette modification-là, c'est déjà un grand pas. Mais la traçabilité, c'est tout relatif. Le Registre Central des Armes note le n° du batis, du chassis, et c'est ce qui compte, en effet. Mais le Banc d'Epreuves de Liège note le n° du canon. En fait, le Banc d'Epreuve établit si le canon est capable de résister au tir, à la pression, et c'est donc le canon qui l'intéresse! Il y a donc une certaine logique dans tout cela, mais pas beaucoup de clarté. Et puis, ne vous faites pas trop d'illusions, sur la traçabilité: il y a des milliers d'armes en circulation, de par le monde, qui portent le même numéro de série. Missiles, sous-marins, avions, armes légères, tout ce que vous voulez. Quand un service secret d'une grande puissance soutient une opération militaire, ici ou là, il fait fabriquer des armes portant une suite de numéros de séries, produits en double ou en triple! Une série est envoyée dans le pays d'opération, l'autre, tout à fait légalement, dans un pays quelconque. L'Amérique Latine, a une réputation bien établie, pour ce qui est des fabrications en double ou triple série...

 

Le Bastion: Les adversaires de la détention d'armes, disent aussi que l'on risque d'acheter une arme, sous le coup de l'émotion, pour commettre un meurtre ou un suicide. Là aussi, vous avez une proposition constructive?

 

Collectionneur: Oui, je proposerais un moratoire de 15 jours. Quelqu'un vient chez moi, il achète une carabine de chasse, on remplit une déclaration, modèle 9, pour vente libre, et on fournit une copie au Registre Central, et une copie à l'acheteur. Celui-ci y fait apposer un cachet dateur, par le Commissariat de Police, par exemple. L'acheteur recevra son arme, quinze jours après. Nous étudions, sur ce point et sur d'autres, un projet, qui pourrait servir de contre-projet à celui du ministre Verwilghen. Nous y reviendrons.

(Bastion n°55 de Septembre 2001)

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