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GUY PICARDAT, COMMANDANT DE BORD DE B-26

 

Depuis près d’un an, Monsieur Guy Picardat est éditeur responsable du « Bastion ». Son père, français, soldat du 59e bataillon pendant la 1re guerre, a été blessé à l’Yser, puis, a été de nouveau mobilisé en 1938. Par la suite, il a travaillé pour les services britanniques jusqu’à son assassinat.

Guy Picardat, élevé dans l’esprit du patriotisme et de l’amour de son pays, avait 16 ans, lorsque la 2de guerre mondiale a commencé. Un jour, curieux de vérifier les racontars, il s’est rendu à la gare de Schaerbeek et a constaté de visu l’embarquement de juifs et non-juifs dans des wagons. Lui-même entrait dans les conditions du travail obligatoire en Allemagne, ce dont il ne voulait à aucun prix. En 1941, son frère jumeau, Yvon, et lui ont donc décidé de s’engager et se sont dirigés vers la France, tentant de passer en Espagne. Ils sont donc partis en direction de Montpellier, en train et à vélo, mais le train a été arrêté à Vierzon, avant la ligne de démarcation.

Là, ils ont été entraînés entre 2 lignes de soldats allemands, alignés en « entonnoir » et arrêtés. Après avoir été conduits chez le commandant militaire de la gare, ils ont été emmenés vers la prison de Tours, en compagnie de 3 soldats. Dans le train, profitant d’un moment d’inattention des gardes qui s’étaient penchés à la fenêtre pour discuter avec un collègue, ils se sont échappés à contre-quai et se sont glissés sous les wagons. Ils ont alors aperçu leurs vélos et sont partis à travers bois vers Montpellier. Blessé à la jambe, Guy Picardat a dû être rapatrié.

Ils ont vécu alors dans la Belgique occupée, mais les Allemands sont progressivement devenus plus inflexibles sur la question du travail obligatoire et, en 1943, les deux frères ont été arrêtés dans le tram, conduits à la SIPO et bouclés dans la cave. Ils y ont passé 2 jours et 2 nuits, dans le noir complet, avant d’être emmenés au 2ème étage pour rencontrer le commandant Schmidt. Celui-ci leur a reproché d’avoir fait trop de bruit dans le tram et de ne pas s’être présentés volontairement pour le travail obligatoire en Allemagne. Ils ont été conduits rue de Namur, dans un bâtiment d’ailleurs toujours abandonné depuis la guerre. On les y a fait entrer dans une pièce nue, grise, seulement meublée d’une table et d’une chaise. Là, un Allemand leur a dit de se déshabiller, puis est sorti en laissant la porte en

trouverte. Par l’entrebâillement, ils ont vu un rai de lumière qui leur a fait prendre conscience qu’il devait y avoir une ouverture : son frère et lui sont sortis sans courir ni attirer l’attention de la sentinelle.

La fiancée d’Yvan est allée chercher de l’argent chez leur grand-mère pour acheter du tabac, précieuse monnaie d’échange en temps de guerre.

C’est en essayant de reprendre contact avec leur père qu’Yvan a appris qu’il avait été abattu par un collaborateur nazi flamand. Le soir même, ils sont repartis vers le sud avec 2 copains, bien décidés à franchir la frontière espagnole et à s’engager. Ils ignoraient alors que, suite à un accord entre les Allemands et Franco, ils pouvaient y être arrêtés…

Ils ont été conduits à la « Càrcel Modelo » de Figueras. Les conditions de détention y étaient atroces : une cellule nue, des vêtements légers pour dormir à même le sol: pas de couverture ni de matelas. Ils étaient enfermés en cellule toute la journée, de 3 à 18 prisonniers par cellule selon les jours: ils devaient alors rester assis, collés les uns aux autres. G. Picardat y a passé 4 mois et a été libéré suite aux pressions américaines. Son frère, qui n’avait pas lâché son arme suffisamment vite au moment de leur arrestation, a dû y rester un mois de plus.

Il a alors été dirigé sur les arènes de Malaga, avant d’embarquer pour Casablanca, au Maroc. Il y a retrouvé son frère par hasard, peu après et tous deux se sont engagés comme pilotes volontaires. Ils sont restés quelques mois dans un camp de rassemblement avant d’embarquer sur un transport de troupes pour l’Amérique, à la fin de 1943, pour y suivre une formation de pilote.

La formation de base se faisait sur un biplan, en Caroline du sud. Il est ensuite parti en Alabama, pour une formation de 2 mois sur T6, devenu l’avion d’entraînement le plus utilisé pendant la guerre et qui a encore servi pendant la guerre de Corée. Il fut alors envoyé en Géorgie pour une formation de 2 mois sur B-25 Mitchell, en préparation au B-26, avion très difficile à piloter. Il est parti ensuite au Kansas pour un entraînement de 2 mois sur B-26, puis, à Detroit, au Michigan pour la mise en équipages. Près de 350 pilotes, dont son frère Yvan, se sont tués au cours des entraînements.

Le B-26 était l’avion le plus moderne de l’époque. Les pilotes recevaient une formation complète, en prévision des bombardements en Allemagne, de même qu’une formation à la navigation aux instruments comprenant ILS (Instrument Landing System) et atterrissage de nuit, ce qui était rare à l’époque.

L’Amérique était très en avance et paraissait un pays très moderne. Par exemple, un aéroport important était signalé par deux phares, avec un double faisceau : on les voyait de loin. Il y avait aussi des routes aériennes : tous les 10 miles, une balise morse donnait une lettre qui permettait de s’orienter et de traverser l’Amérique sans radio.

A la fin de la guerre, il est resté en stand by à Detroit, avant de revenir à Paris, en ’44. Il a effectué des missions de photographie-reconnaissance en rase-mottes, dans un avion non-armé avant d’être démobilisé, en mars ’46.

Aujourd’hui, Guy Picardat continue à faire son devoir pour son pays et à lutter contre l’invasion et le crypto-fascisme au pouvoir en Belgique...

Propos recueillis par M.S.

                                                           

 

(Bastion n°65 de novembre 2002)

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