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Une leçon de démographie (3)  

Par Charles Magne

   

La réflexion entamée dans ces colonnes, sur la démographie, aurait-elle lézardé le mur du silence du politiquement correct ? En faisant l’inventaire des informations parues à ce sujet, au mois de février, on pourrait presque le croire. Cela a commencé par l’annonce de l’Office Européen des Statistiques, Eurostat, selon laquelle le solde migratoire de l’Union Européenne a constamment été positif, entre 1995 et 1999, représentant annuellement 0,2% de la population totale de l’Union. Présentés de cette façon, les chiffres de l’immigration peuvent paraître insignifiants aux yeux du néophyte. Analysés dans leur dynamique, on voit qu’ils sont réellement cataclysmiques.

Un solde est, en effet, une donnée relative. Pour connaître le nombre total des immigrants, il faut y ajouter le nombre des émigrants européens qui ont fuit l’oppression fiscale et politique vers les Etats-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Amérique latine. En extrapolant les chiffres de l’Allemagne et de la France (environ 200.000 départs cumulés par an) à toute l’Union, on doit approcher les 400.000 émigrants annuels. Ce qui permet de situer le nombre d’entrants officiels à 1,2 million par an, soit 6 millions en cinq ans. Ce chiffre n’est, sans doute, que la pointe émergée de l’iceberg. Il est, tout à fait, probable que pour chaque immigrant légal, il entre au moins un clandestin[1]. Ce qui porterait, alors, le véritable nombre des immigrants, sur la période 95-99, à 12 millions.

Pour se donner une idée de l’ampleur du phénomène, il faut s’imaginer qu’une portion du territoire de l’Union Européenne, équivalente à la surface totale de la Belgique s’est peuplée de Maghrébins, de Turcs, de Kurdes et autres subsahariens, avec une densité supérieure à celle de notre pays - pourtant une des plus élevées au monde. Sachant que la population de l’Union a crû – dans cette période - de 0,25% par an en moyenne, il est donc déjà, officiellement, admis que 80% de cet accroissement a été assuré par la seule immigration. Le reste étant le fait des naissances allogènes sur notre sol et la conséquence de l’allongement de la durée de vie des Européens de souche[2].

Dans un article paru le 14 février, le Figaro a reconnu la gravité de la situation. Aussi, une fois n’est pas coutume, nous citerons le journal du centre-mou français : «Aujourd’hui déjà (en Europe, ndr), la proportion de personnes âgées (plus de 65 ans) dépasse la population de jeunes (moins de 15 ans)… La fécondité est en dessous du seuil de renouvellement de la population dans tous les pays d’Europe… L’indice de fertilité de l’Union Européenne n’est que de 1,47.[3] » Tous les pays sont concernés sauf la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni qui conservent un taux de croissance démographique positif, mais, ajoute le Figaro : « seulement grâce à l’immigration ».

On ne saurait être plus clair. D’un côté l’Europe se vide de sa population de souche, de l’autre elle se remplit de peuplades allochtones. L’éviction est en route… Or, que font les gouvernements européens face au péril ? Ils tergiversent et palabrent avec les lobbies immigrationnistes ! Quant à l’efficacité de leurs politiques migratoires, elle est totalement nulle selon le rapport démographique annuel de l’OCDE, rendu public le 24 février. En effet, celui-ci révèle que : « Les flux migratoires vers les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques continuent à croître malgré le ralentissement de l’activité économique et le renforcement des contrôles aux frontières … Cette tendance concerne aussi bien les regroupements familiaux que les migrations à des fins d’emploi, ou les demandeurs d’asile… » Le rapport souligne aussi « un nombre croissant d’acquisitions de la nationalité dans l’ensemble des pays de l’OCDE, soit en moyenne 550.000 par an au cours des dix dernières années. » Autrement dit, le phénomène de substitution de population est entré dans une phase exponentielle de type inflationniste.

Ces constats amers, ne nous consolent pas d’avoir vu les choses telles qu’elles étaient avant les médias officiels. Car, leurs analyses n’offrent aucune perspective de redressement. Pourtant, il existe tout un éventail de solutions à mettre en oeuvre. La plus urgente serait la fermeture totale des frontières aux migrants sociaux. Ensuite, il faudrait créer un cadre économique et fiscal propice aux naissances.

Pour définir les contours de ce cadre, il faut s’interroger sur les causes profondes de la dénatalité européenne. Sans entrer dans un déterminisme de type marxiste, il faut reconnaître que la fin du baby boom (1965) suit de près la fin du pic de l’exode rural (1960). Elle s’inscrit aussi dans un contexte de socialisation des économies européennes, accentué notamment par « l’économie de guerre ». Il n’est pas inutile de rappeler, ici, que le taux moyen de la pression fiscale était, en Europe, de 10% du PIB en 1914, de 30% en 1960 et qu’il est aujourd’hui de plus de 45%.

La mentalité des Européens, jusqu’à la fin des années 1950, était encore fortement inspirée par le monde rural. C’est à dire par une réalité marquée par des cycles naturels malthusiens, par la solidarité intergénérationnelle (les grands-parents s’occupaient des enfants pendant que les parents étaient aux champs), par de grands espaces et un esprit d’indépendance propre aux paysans libres.

Dans cet univers, le patrimoine déterminait entièrement la survie des familles. Sans terre, on ne pouvait se nourrir. Mais, sans bras on ne pouvait valoriser la terre. Les enfants étaient alors, par nécessité, nombreux car ils étaient perçus comme une fonction du revenu futur pondérée par le taux de mortalité. Plus simplement : la famille paysanne se devait d’avoir beaucoup d’enfants pour être certaine que ceux qui survivraient subviendraient à ses besoins futurs. Ainsi, le désir d’enfants était-il soutenu par l’instinct de survie.

Au XXe siècle, la guerre, l’exode rural, l’industrialisation et la socialisation vont bouleverser ce schéma de pensée. L’homme devient urbain. Il vit dans un environnement où l’espace est rare, où la solidarité intergénérationnelle est rompue – faute d’espace les vieux ne vivent plus sous le même toit et sont placés à l’hospice. La garde des enfants devient un problème matériel pour les femmes qui sont appelées à travailler dans l’industrie pour, dans un premier temps, remplacer les hommes partis au front.

De surcroît, l’universalisation des régimes de retraite par répartition a créé l’illusion d’une « libération démographique » en supprimant les obligations de solidarité traditionnelle des descendants envers leurs ascendants. Ce mirage collectif a fonctionné tant que la démographie était élevée et que les ayants-droits étaient en nombre limité. Cependant, l’allongement de la vie et le recul des naissances conduisent le système à l’implosion. Or, ce qu’il faut bien saisir, ici, c’est que l’hiver démographique, que nous vivons actuellement, est consubstantiel au régime des retraites par répartition. A partir du moment où l’on donne l’impression que ‘’l’Etat’’ prendra toujours à sa charge les pensions des retraités, on supprime la motivation à avoir des enfants pour assurer son avenir. Bien plus, on incite chaque individu à s’en remettre aux enfants des autres pour financer sa propre retraite.

Pour prendre une image connue des économistes, on diffuse, dans le corps social, la mentalité du passager clandestin. Chacun espère que l’autre payera le voyage de la retraite. Or, vient le moment où la croisière ne s’amuse plus et où le bateau sombre sous le poids des charges.

Pour être complet, sur l’analyse des facteurs s’opposant à la natalité, il faut ajouter la tendance social-démocrate à laminer les patrimoines familiaux par la confiscation de l’épargne et la taxation de la mort – indûment appelée impôt sur les successions. Pourquoi avoir des enfants si les efforts de toute une vie méritante sont confisqués par l’Etat ? Et, pour constater, ensuite, que les produits de cette confiscation sont, principalement, redistribués aux allocataires allogènes ? Il y a, là, un moyen assuré de décourager la reproduction (la production aussi, mais c’est un autre débat).

Et, de fait, la dénatalité s’est progressivement installée avec le triomphe de l’Etat-providence. Ce dernier a bien tenté de réagir par plus d’intervention publique en subventionnant les naissances par les allocations familiales. Mais, là aussi, l’échec a été total. Le taux de fécondité n’a cessé de baisser, sauf pour les allogènes installés chez nous[4].

Alors que faire ? En quelques mots : rétablir le lien de causalité entre la postérité et la prospérité. Cela implique que la famille soit consacrée comme valeur centrale de la société. Ce qui est naturel puisqu’il y va de sa survie. Il faut donc revoir complètement le système fiscal et revenir à des niveaux d’imposition favorisant les familles et garantissant la transmission des patrimoines. Un système de parts intégrales serait souhaitable. Le revenu familial serait, ainsi, divisé par le nombre d’enfants avant l’application du barème. Les célibataires n’auraient qu’une part et devraient, en outre, s’acquitter – après un certain âge - d’un impôt de solidarité à l’égard des familles – impôt justifié par les services rendus aux célibataires par la simple existence des familles.

La transition d’un régime de retraite par répartition à un système par capitalisation pourrait être facilitée par l’octroi de parts d’épargne défiscalisées en fonction du nombre d’enfants. En d’autres termes, le niveau de retraite dépendrait en partie du nombre d’enfants. Faudrait-il, parallèlement, revaloriser les allocations familiales ? Compte tenu du cadre juridique actuel, le danger serait, alors, d’augmenter les transferts en faveur des familles d’immigrés, ce qui n’est pas le but poursuivi par le FNB mais, plutôt, celui des partis traditionnels.

Mieux vaudrait, selon nous, opter pour un schéma d’incitation à des gains marginaux en défiscalisant une fraction croissante des revenus, par l’augmentation de la valeur de la part de chaque enfant supplémentaire. Concrètement, une famille ayant un revenu annuel de 24.000 € avec un enfant déclarerait un revenu familial de 8000 € (24.0000/ 3 parts), avec deux enfants 5333 € (24.000/ 4,2 parts) avec trois enfants 4000 € (24.000/ 6 parts). Au-delà de 3 ou 4 enfants, il n’y aurait plus d’avantage fiscal, l’objectif de renouvellement de la population étant atteint[5].

Ces quelques suggestions pratiques montrent que ne rien ne justifie l’inertie actuelle de nos gouvernants en matière démographique, si ce n’est leur inclination funeste pour ce qui nous affaiblit et nous asservit. Toutefois, les solutions matérielles ne suffiraient pas. Il faudrait, aussi, restaurer l’amour de la vie et de la patrie qui donnent la joie de perpétuer une culture et le courage de défendre sa civilisation. 

 

 



[1] Nous mettons au défit les démographes au service du système de nous contredire sur ce point.

[2] L’allongement de l’espérance de vie conduit provisoirement à une augmentation de la population totale en élargissant le sommet de la pyramide.

[3] Avec ce taux de fécondité, la population européenne diminuera de moitié toutes les 2 générations.

[4] Phénomène qui s’explique par la structure relative des revenus. Voir le 2e volet de cet article.

[5] Après le 3e ou le 4e enfant, le choix serait induit par l’appréciation des individus et la loi de Cantillon.

 

(Bastion n°70 d'avril 2003)

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